Tu ne tueras pas ma passion
Longtemps, j’ai cru pouvoir emprunter la voie de la photographie et en faire un projet de vie. Plutôt qu’une croyance, c’était surtout une envie, aussi exacerbée qu’inaccessible. Et lorsqu’elle a commencé à s’installer dans mon quotidien, à prendre de plus en plus de place, j’y ai vu une belle aventure.
Mais elle est aussi devenue une frustration.
Ce n’est que très récemment que j’ai accepté que c’était une utopie et que j’allais être heureuse aujourd’hui, avec ce qu’elle m’apporte ; une photographie aléatoire, qui retrace le plus souvent des aventures de voyages, d’escapades ou parfois du quotidien. J’ai souvent mis ça sur le dos des autres, le dos du temps, le dos de l’algorithme. J’ai souvent accusé l’autre que ce projet de vie – mon projet, ne prenne pas. Car j’en ai eu des lubies de carrière, de visibilité, de tisser des liens avec les acteurs de ce milieu que je trouve toujours inaccessible. Et je pense que nous sommes nombreux à avoir eu ces aspirations, pour la plupart tuées dans l’œuf.
À tel point que souvent, j’ai pensé raccrocher. À quoi bon, pour qui ? Après tout, ça ne prendra jamais.
Chaque photo partagée devenait une douleur. Mal-aimée, invisible. Elle qui me tient à cœur au point de l’afficher mais qui ne fait vibrer que moi. C’est difficile, c’est personnel.
Et tout ça, c’est avant tout de ma faute. Car j’ai voulu trop grand, sans vraiment m’en donner les moyens. Mais je n’ai jamais su réellement comment faire. J’ai manqué de structure, d’investissement et de stabilité. Je pensais que les choses seraient faciles, qu’il suffisait d’un peu de ci ou de ça, que si ça fonctionnait pour les autres, ça devait fonctionner pour moi. Je procrastine, j’attends que “les choses se fassent”, comme pour beaucoup d’autres sujets dans ma vie, sauf que ceux-là ne m’animent pas autant. J’ai voulu copier, reproduire, m’approprier voire imiter ou singer ceux qui, initialement m’inspiraient. J’y ai parfois perdu de mon authenticité mais la satisfaction éphémère d’y trouver un semblant d’audience a su me rassurer, le temps d’un court moment.
Je sais que le train est passé plusieurs fois, je ne dis pas qu’il ne passera plus, mais j’accepte que l’aventure longtemps rêvée soit derrière moi.
Désormais, je suis davantage dans une quête de simplicité et de sérénité - de créer et de partager pour moi, pour ceux qui sont toujours là - d’expérimenter, tâter, hasarder et surtout, renouer avec le plaisir et l’excitation de ce que la photographie suscite depuis de nombreuses années.
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